Retrouvez cette chronique sur :
Radio Espérance
Chronique d’écologie intégrale du samedi 17 Mai 2025, Fête de S. Matthias, apôtre
S. Matthias, apôtre est fêté le 14 mai. C’est un apôtre qui fait partie de l’équipe mais qui est sur le banc des remplaçants. Il fut tiré au sort pour prendre la place de Judas laissée vacante. On sait assez peu de chose sur lui si ce n’est qu’il est devenu le saint patron des tailleurs et des confiseurs. Il est invoqué contre la stérilité conjugale et contre la petite vérole. Comme on estime qu’il fut martyrisé par décapitation à la hache, parmi d’autres hypothèses, on le représente avec l’outil de son martyre. C’est pourquoi on fait encore de lui le saint patron des charpentiers et des taillandiers. La tradition indique qu’il aurait évangélisé la Cappadoce et aurait été martyrisé à Colchis en Géorgie. Je réfléchir brièvement sur un point qui m’interpelle dans la manière dont S. Matthias a été choisi, entre l’Ascension et la Pentecôte. C’est intéressant car il est ainsi validé par l’Esprit Saint dans sa charge missionnaire alors qu’il était rassemblé avec ses collègues au cénacle. C’est cette validation qui attire mon attention aujourd’hui. Et me fais poser la question : le hasard est-il synonyme de désordre ? La première lecture de la fête de ce jour est étonnante car elle met en scène un tirage au sort en disant qu’il s’agit d’une méthode de désignation d’un nouveau membre du collège des apôtres en signifiant que ce sera la volonté de Dieu. On fait une prière et on transforme ce qui est habituellement relégué à du chaos et du désordre, en une action divine. Cela pourrait paraître comme de la superstition, et en tout cas, cela fait longtemps que les nominations ne se passent plus comme ça dans l’Eglise. Imaginez les cardinaux qui jouent à la courte paille pendant un conclave… Autre question, faut-il voir derrière tout phénomène aléatoire le doigt de Dieu qui oriente le résultat d’un tirage en fonction de sa très sage providence ? là aussi cela me semble un peu facile. Je trouve en revanche intéressant de penser que s’il y a du hasard dans l’ordre de la création, c’est qu’il est voulu par Dieu comme une sorte de lubrifiant nécessaire à son fonctionnement. Le hasard est nécessaire pour que la création fonctionne bien et éviter que la machine s’enraye. C’est en particulier le cas dans tout ce qui concerne la diversification du vivant : le hasard est le moyen pour Dieu de créer de la nouveauté et de la diversité qui est bonne. Il est bon que la liturgie de ce jour nous rappelle que le hasard n’est pas l’adversaire de Dieu, ais une aide efficace à la réalisation de son projet. Si S. Matthias a été présenté comme candidat à la charge apostolique, ce n’est pas un hasard non plus, c’est qu’il appartenait au cercle des cent vingt disciples qui ont vécu un certain compagnonnage avec Jésus et ont été témoin de sa vie depuis son Baptême, de sa mort et de sa résurrection, jusqu’à l’Ascension. Cela implique également d’avoir entendu son enseignement, d’avoir mangé et bu avec lui, notamment après la résurrection. Les textes de la messe du jours qui reprennent tous ces éléments, insistent sur la question de l’appel à la dignité apostolique « il retire le pauvre de la cendre pour qu’il siège parmi les princes, parmi les princes de son peuple » (Ps 112, 8) dit le psaume. Conformément à l’enseignement de Jésus, les apôtres sont des princes dans la mesure qu’ils se reconnaissent serviteurs, qu’ils sont pauvres et qu’ils viennent de la cendre, symbole d’humilité. Mais Jésus dans l’Evangile rappelle lui-même ce que signifie appartenir à son cercle restreint : la mise en œuvre du commandement à l’amour. « Vous êtes mes amis si vous faites ce que je vous commande », dit Jésus. « Mon commandement, le voici : Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés. » Aimer comme Dieu aime, c’est une mission incommensurable, et comme dirait S. Augustin, la mesure d’aimer c’est d’aimer sans mesure. » Cela montre en fait l’impossibilité de la tâche pour des hommes qui sont dans la finitude et dont la capacité d’aimer est par définition finie, limitée. La mesure de l’amour divin se déploie jusqu’aux confins de l’univers créé et inclut l’ensemble des créatures. La mission d’apôtre doit donc rendre compte de cette dimension de l’amour divin et s’appliquer à la création, aux créatures qui nous sont confiées aussi bien qu’à nos frères et sœurs en humanité. Alors quand Jésus déclare qu’« Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime. » cela veut dire que l’on peut y inclure la création. Dans un récent article des Etudes, Jean-Philippe Pierron écrivait sur le phénomène des martyrs de l’écologie, des personnes qui ont donné leur vie et qui se sont fait tuer à cause de leur engagement pour la sauvegarde de la planète. Cette dernière fait partie des pauvres que nous sommes appelés à soigner et à aimer, tout en sachant qu’en prenant soin des écosystèmes nous prenons soin de la famille humaine qui y habite. C’est inséparable et non opposable. Aimer la création et en prendre soin c’est prendre soin de la famille humaine, du début de la vie jusqu’à la fin. Le témoignage de cet amour, c’est donc ce que nous sommes en droit d’attendre de nos évêques qui sont aujourd’hui les successeurs des apôtres. C’est ce que nous sommes en droit d’attendre de l’Eglise, tant hiérarchique, que de nous-même qui composons ses membres, les disciples présents de Jésus Christ.
Un Commentaire