Chroniques d’écologie intégrale – 14 Février 2024 – Mercredi des cendres

Chroniques d’écologie intégrale – 14 Février 2024 – Mercredi des cendres

Chronique d’écologie intégrale du mercredi 14 Février 2024, Mercredi des cendres

La liturgie du mercredi des Cendres nous invite à méditer sur le sens de la pénitence, pour nous et pour nos vies chrétiennes. En ce début de carême, c’est évidemment bien opportun, comme chaque année depuis des siècles, mais cela l’est aussi dans le contexte de la sauvegarde et du soin de la création. En effet, dans le sacrement de la réconciliation la pénitence a pour fonction de nous aider à prendre conscience du poids de nos actions dans le réel. Un acte bon ou mauvais, modifie le réel en bien ou en mal. Quand c’est en mal, la pénitence a alors pour fonction pratique et pédagogique de nous faire procéder à une réparation qui peut être effective : si non avons commis un mensonge, il s’agit de rétablir la vérité. Elle peut être symbolique. Si nous avons commis l’irréparable de manière irréversible, il s’agit de poser un acte qui montre notre contrition et notre regret pour la faute commise. Elle peut être spirituelle, c’est-à-dire que la réparation sera accomplie dans le registre de la prière pour renouer le lien rompu avec Dieu par le péché : « vous me direz un Pater et trois Ave » ou « vous ferez un pèlerinage à Rome ». Face à la crise écologique la fonction réparatrice et pédagogique de la pénitence prend tout son sens : il s’agit de s’engager à réparer ce qu’il est possible de réparer sur le plan pratique de la lutte contre le changement climatique ou l’érosion de la biodiversité. Même si aujourd’hui de nombreux aspects de la crise écologique sont irréversibles, il s’agit de s’engager avec amour dans le soin pour la création dans les gestes du quotidien. Il s’agit de pratiquer les œuvres de miséricorde envers la création comme le demande le pape François, ne serait-ce qu’en priant pour sa sauvegarde. Dans tous les cas, la démarche de pénitence s’accompagne ici aussi d’une demande de pardon et de protection pour les fléaux et calamités écologiques dont nous sommes responsables, nous, créatures humaines qui avons failli à notre mission de gardien de la maison commune et avons « déçus l’attente divine », selon l’expression de François dans Laudato si’ (LS 61). La démarche pénitentielle et du jeûne de carême, rejoint la question de la sobriété heureuse en préparation à la transition écologique voire, à l’effondrement. Le regret pour nos fautes est en effet à mettre en tension avec la joie car, paradoxalement, les textes de ce jour nous appellent à une pénitence heureuse. On passe de « Contre toi, et toi seul, j’ai péché, ce qui est mal à tes yeux, je l’ai fait » à « Rends-moi la joie d’être sauvé », dit le Ps 50 (14.17) que nous chantons en ce jour, « que l’esprit généreux me soutienne. Seigneur, ouvre mes lèvres, et ma bouche annoncera ta louange ». La démarche pénitentielle proposée chaque année par le carême est une démarche de recentrement sur la Parole de Dieu par le jeûne, l’aumône et la prière selon l’enseignement de Jésus dans l’évangile de ce jour. Et on peut dire que ce recentrement passe par la pratique de la sobriété. Or la sobriété par définition, ça ne s’impose pas aux autres contrairement à ce qu’on voudrait nous faire croire. C’est une démarche libre et volontaire car en éthique, la sobriété correspond à la pratique de la vertu de tempérance. Quelle est la finalité de la pratique des vertus dans la tradition philosophique morale ? La poursuite d’une vie bonne et du bonheur, nous dit Aristote. La pratique de la sobriété en contexte de crise écologique n’échappe pas non plus à ce projet. C’est pourquoi on se sent obligé de rajouter le qualificatif « heureuse » parce qu’on a un peu oublié le principe du projet moral de l’éthique des vertus : vivre dans la joie. La pénitence du carême pourrait être l’occasion favorable de nous rappeler cela : que la sobriété heureuse n’est pas le chemin de la restriction, mais de la vie en abondance dans toutes les dimensions de notre humanité. Alors, veuillez pardonnez mon langage mais, un écolo qui fait la gueule est un écolo pas crédible, comme un chrétien qui fait la gueule n’est pas un chrétien crédible non plus. Il ne faut pas confondre la sobriété avec l’austérité triste, encore moins avec la misère subie. Permettez-moi de paraphraser et de prolonger l’enseignement de Jésus dans l’évangile de ce mercredi des Cendres : « Et quand vous changez de mode de vie pour embrasser la sobriété qui prend soin de la création, ne prenez pas un air abattu, comme les hypocrites : ils prennent une mine défaite pour bien montrer aux hommes qu’ils se sacrifient. Mais toi quand tu changes de vie pour un mode de vie sobre, agis naturellement et joyeusement comme si l’ère du pétrole était déjà terminée, et ton Père qui est dans les cieux te le rendra par les soins de la création pour toi et ta famille. » Le carême est ainsi un moment favorable pour vivre cette conversion. La conversion est bien le signe de l’action du Salut en nos cœurs comme dans nos vies concrètes. La conversion à l’écologie intégrale, comme à la sauvegarde et au soin de la création sont en effet le signe de l’accueil de la grâce de Jésus dans nos vies et une anticipation de la vie de ressuscité, en préparation à Pâques. Oui saint Paul a raison : « Le voici maintenant le moment favorable, le voici maintenant le jour du salut » (2 Co 6, 2).

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