Chronique d’écologie intégrale du samedi 25 Mai 2024, Fête de la visitation de la Bienheureuse Vierge Marie
Le 31 mai l’Eglise célèbre la fête de la visitation de Marie auprès de sa cousine Elisabeth. Traditionnellement, cette fête avait pour objet la célébration des premiers fruits de la Rédemption, en la personne de Jean Baptiste bébé. Ce n’est curieusement qu’à la fin du xixe siècle que le pape Urbain VI fixe la date de cette fête, même si en de nombreux endroits elle était commémorée à des dates différentes depuis longtemps. Mais ce qui me frappe à la lecture des textes de ce jour, c’est l’omniprésence de la joie. Joie de Jean-Baptiste qui annonce à sa mère qu’il est en train de se passer quelque chose de remarquable ; joie d’Elisabeth qui accueille la mère de son Seigneur ; joie de Marie à qui est permise l’exultation du Magnificat dans la reconnaissance de la grâce qui lui a été faite. En effet, Marie débordant de la force de la grâce qui vient de lui être annoncée par l’ange, empli de l’Esprit saint qui l’a recouvert de son ombre, s’en vient à l’aide de sa cousine, pour l’assister jusqu’au terme de sa grossesse. A travers cette mission, elle est porteuse de la joie du Salut qui déjà se répand dans et par ce quatuor composé de deux mamans en devenir et de deux bébés à naître. Simplicité et humilité d’un contexte qui préfigure la simplicité et l’humilité de la crèche, et… l’humiliation de la croix. Marie vit avec intensité une exultation qui correspond à l’abaissement de Dieu. Chez saint Luc, l’abaissement de Dieu que Marie relate dans le Magnificat – « Il s’est penché sur son humble servante » (Lc 1,48) –, fait écho à celui que saint Paul enseigne dans l’épitre aux Philippiens : « Le Christ Jésus […] ne retint pas jalousement le rang qui l’égalait à Dieu, […] mais il s’est anéanti. » (Ph 2, 5-7) Celui qui s’est vidé de lui-même pour devenir créature humaine, est présent en Marie ; et Dieu « se penche » sur elle pour réaliser ce mystère de l’incarnation par abaissement. Il est frappant de voir que le mouvement du Magnificat suit de manière très puissante le mouvement d’abaissement-exaltation vécu par le Christ. En effet, en conséquence de l’abaissement du Christ jusqu’à la croix, Dieu exalte son Fils dans la résurrection. La louange de Marie porte bien sur l’action d’exaltation des petits par Dieu, à commencer par elle, et dans la dénonciation de la perdition de ceux qui se sont élevés par eux-mêmes : « Il s’est penché sur son humble servante ; désormais tous les âges me diront bienheureuse. Le Puissant fit pour moi des merveilles ; […] Déployant la force de son bras, il disperse les superbes. Il renverse les puissants de leurs trônes, il élève les humbles. Il comble de biens les affamés, renvoie les riches les mains vides. Il relève Israël son serviteur ». Complétement inscrite dans ce mouvement christique et configuré par lui, Marie peut être reconnue dans l’accomplissement plein et entier de sa nature humaine, celle de créature créée à l’image de Dieu. L’image parfaite de Dieu c’est son Fils. Pour nous Jésus, Dieu fait homme, nous montre quelle est la voie de l’imitation parfaite de Dieu dans nos vies pour être à son image et à sa ressemblance : par l’abaissement. Pour Marie c’est très clair. Au lieu de s’enorgueillir du privilège qu’elle reçoit de devenir la Mère du Sauveur, voilà qu’au contraire elle s’empresse de se faire la servante de sa sœur dans le besoin, à savoir sa cousine qui se prépare à accoucher. Dans le deuxième choix de première lecture saint Paul énumère la liste des bonnes actions qui peuvent ainsi naître de l’accueil d’une telle grâce dans la pratique de l’amour fraternel. Marie quant à elle se met au service de la femme âgée et affaiblie mais qui se prépare pourtant à accueillir la vie, avec tout le cortège de fatigues de contrariétés et de geste simples et humbles que requiert la préparation et la mise en œuvre de cet accueil. Est-il permis à un jeune papa d’évoquer les quantités de vomi et de caca que cela représente, un mois après la naissance de son premier enfant ! « Laissez-vous attirer par ce qui est humble » dit saint Paul aux Romains (12, 16). Mais au cœur de cet abaissement se trouve une joie profonde qui se goute, se répand et se partage. Pour en revenir à la joie, le premier choix de première lecture qui est tiré du livre du prophète Sophonie (3, 14-18), et le Cantique tiré du livre du prophète Isaïe (12, 6) l’attribuent à Jérusalem. Lors de la mémoire de la bienheureuse Vierge Marie Mère de l’Eglise au lundi de Pentecôte, nous avions déjà rencontré le fait que la liturgie proposait cette belle association entre Marie, Jérusalem, et l’Eglise. En commentant l’évangile de Jean et Marie au pied de la croix, je faisais la proposition suivante : Marie représente la création confiée par son Fils à toute l’humanité. Aujourd’hui la lecture du texte de Sophonie me touche particulièrement car dans l’exultation de Jérusalem qui fait écho à celle de Marie dans le magnificat, j’ai lu et entendu la clameur de la terre. Non pas celle de sa souffrance ! Mais celle de son exultation dans l’accueil de son Créateur en son sein, sein de Marie, et sein de la création. C’est ce que confirme Isaïe dans le cantique : « Jouez pour le Seigneur, il montre sa magnificence, et toute la terre le sait. » Au jour de la visitation, Marie représente alors cette humanité servante parfaitement à l’image de Dieu, et la création tout entière qui entre dans la louange de son Salut.
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