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Chronique d’écologie intégrale du samedi 23 Novembre 2024, Mémoire facultative de S. Charles de Foucauld, prêtre
Parmi les figures incontournables de l’écologie intégrale illustrant la relation aux autres, il faut citer S. Charles de Foucauld que nous fêtons le 1er décembre. Voici comment le pape François achève son encyclique Fratellli Tutti sur la fraternité universelle : « Dans ce cadre de réflexion sur la fraternité universelle, […] je voudrais terminer en rappelant une autre personne à la foi profonde qui, grâce à son expérience intense de Dieu, a fait un cheminement de transformation jusqu’à se sentir le frère de tous les hommes et femmes. Il s’agit du bienheureux Charles de Foucauld. » (FT 286). S. Charles de Foucauld est né le 15/09/1885 à Strasbourg. Ses parents meurent quand il a six ans et est recueilli par son grand-père. Il perd la foi assez jeune et après deux années d’études à l’école militaire il devient officier. Le « Gros Foucauld » comme on l’appelait alors connaît alors une vie de débauche. En 1880, il est affecté en Algérie, puis en Tunisie. Il revient en métropole en 1882 et blasé de la vie de garnison, il démissionne de l’armée. Il décide de voyager pour explorer le Maghreb et en particulier le Maroc qui est fermé aux étrangers. Le monde scientifique est enthousiasmé de ses rapports sur ce pays normalement inaccessible. De retour en France, il se met à fréquenter l’église et à prier en demandant à Dieu « si Vous existez, faites que je Vous connaisse ». Il s’adresse à l’abbé Huvelin avec qui il entretient une forte correspondance spirituelle. En 1890 il laisse tout son héritage et entre à la Trappe de Notre Dame des Neiges en Ardèche. Insatisfait par cette vie de laquelle il gardera pourtant toujours le cadre, il décide de partir en 1897 en Terre sainte pour suivre Jésus à la trace, et il s’installe comme domestique chez les Clarisses de Nazareth. Il est ordonné prêtre en 1901 à Viviers, puis il change encore d’orientation. Je le cite : « Sachant par expérience que nul peuple n’était plus abandonné que les musulmans du Maroc, du Sahara algérien j’ai demandé et obtenu la permission de venir à Béni Abbès, petite oasis du Sahara algérien sur les confins du Maroc[1]. » C’est là selon les mots du pape François, que je cite : « Il a orienté le désir du don total de sa personne à Dieu vers l’identification avec les derniers, les abandonnés, au fond du désert africain. Il exprimait dans ce contexte son aspiration de sentir tout être humain comme un frère ou une sœur, et il demandait à un ami : « Priez Dieu pour que je sois vraiment le frère de toutes les âmes[2] ». Il voulait en définitive être « le frère universel[3] ». Mais c’est seulement en s’identifiant avec les derniers qu’il est parvenu à devenir le frère de tous. » (FT 287) Il vit à Benis Abbès jusqu’en 1904 puis rejoint les Touaregs dans le désert jusqu’en 1916 date à laquelle il est assassiné comme victime collatérale de la première guerre mondiale qui s’est exportée en Afrique. Il est l’auteur du premier dictionnaire touareg-français, ouvrage qui fait référence. Il est béatifié le 13 novembre 2007 par Benoît XVI et canonisé le 15 mai 2022 par François. Frère universel que cela signifie-t-il pour S ; Charles de Jésus ? Je cite Jean François Six : « il veut être le lien d’amour entre tous, le lien de paix entre tous[4] ». Il s’agit donc de faire circuler l’amour de Dieu entre les humains. Par sa vie militaire il fut en quelque sorte acteur de la colonisation, et même comme prêtre, dans le sens où il fournissait les soins spirituels à la garnison qui se trouvait dans l’oasis. Pourtant ce n’était pas son sujet car Jean-François Six rappelle que la vocation de Frère Charles était « de sauver par la bonté et l’amitié[5] », pas par la mission de l’annonce explicite. Comme la petite Thérèse, sa vocation c’est l’amour qui se situe bien au-delà des enjeux colonialistes. Dans un emploi du temps à l’origine massivement dédié à la prière, il reçoit énormément de visites entre 60 et 100 par jour ! Il doit donc adapter son horaire aux exigences de la charité. Les habitants du coin baptisent la maison de Charles, la Khaoua, « la fraternité », là où se trouve le frère des pauvres. Son témoignage de vie se redouble d’un ascétisme des plus strict. Mettant en œuvre une grande sobriété, il ne prend à midi qu’un repas par jour composé de mil et de dattes, et du pain et de l’eau à d’autres moments. Peut-on dire quelque chose de sa relation à la création ? Le désert, n’est pas un lieu anodin, d’autant plus qu’il est aussi jardinier. Dans une lettre à Henry de Castries, voici ce qu’il écrit de l’oasis de la Saoura, je cite : « L’oasis… est très belle par l’harmonie exceptionnelle de sa forme, le bon entretien des jardins, son air de prospérité… et au-delà de ce paisible et frais tableau, on a les horizons presque immenses de la hamada se perdant dans ce beau ciel du Sahara qui fait penser à l’infini et à Dieu – qui est plus grand[6]. » La création est pour lui aussi témoin du créateur et soutient sa prière. Mais voici ce que l’on trouve sur la première page de son carnet de notes : « Plus tout nous manque sur terre, plus nous trouvons ce que la terre peut nous donner de meilleur : la Croix[7] ». Cela veut-il dire qu’il reconnaît que la création est porteuse du mystère de la Croix par elle-même. Si c’est le cas, c’est une bonne nouvelle… de la création.
[1] Charles de Foucauld, « A Gabriel Tourdes 7 mars 1902 » – Lettres à un ami de Lycée, Paris, Nouvelle Cité, 1982, p.159.
[2] Charles de Foucauld, « Lettre à Henry de Castries » (29 novembre 1901).
[3] Charles de Foucauld, « Lettre à Madame de Bondy » (7 janvier 1902). C’est ainsi que saint Paul VI aussi le désignait, en louant son engagement : Populorum progressio (26 mars 1967), n. 12.
[4] Jean-François Six, Vie de Charles de Foucauld, Paris, Seuil, 1962, p. 94.
[5] Jean-François Six, Itinéraire spirituel de Charles de Foucauld, Paris, Seuil, 1958, p. 273.
[6] Charles de Foucauld, « Lettre à Henry de Castries », cité par Jean-François Six, Vie de Charles de Foucauld, op. cit., p. 91.
[7] Charles de Foucauld, « Inscrit sur la première page d’un carnet que Charles de Foucauld portait toujours sur lui », in Ecrits Spirituels de Charles de Foucauld, ermite au Sahara apôtres de Touaregs, Paris, J. de Gigord, éditeur, 1933, p. 267.
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