Qui étaient Hélène & Jean Bastaire ?

Hélène

Hélène Périchon-Bastaire est née le 19 mars 1916, enfant unique à la santé fragile, elle fut élevée dans la foi catholique. Elle grandit à l’écart dans la campagne d’Eure et Loire où, enfant sérieuse et sévère, elle n’est jamais allée à l’école, recevant son éducation élémentaire à la maison.

Docteur en médecine en 1945, investie dans les sanatoria de la Croix Rouge, Hélène fit des études d’homéopathie à Genève à partir de 1950, puis en Angleterre. Elle laissa moins de traces littéraires que son mari si ce n’est par la traduction depuis l’anglais. Elle travailla sur les traductions de répertoires homéopathiques et des récits naturalistes de Phyllis Kelway, à travers lesquels son amour pour les animaux transparaît. L’écologie a d’abord été l’affaire d’Hélène qui s’est investie dans diverses associations de protection de la nature. De onze ans son aînée, elle épousa Jean en 1950 . C’est elle qui attira son attention sur les questions écologiques, et devint la médiatrice de sa conversion chrétienne. Elle fut atteinte d’une maladie qui l’emporta le 13 avril 1992

Jean

Jean Bastaire est né le 11 juin 1927 à Chamalières dans le Puy-de-Dôme, ville de ses racines familiales. Il eut un frère, Michel décédé quelques années avant lui. Il fait ses débuts à Paris en 1946 comme journaliste cinématographique, mais dût s’arrêter pour des raisons de santé. En effet, après la seconde guerre mondiale il se mit à souffrir de problèmes pneumologiques qui lui permirent l’heureuse rencontre d’Hélène Perrichon, pneumologue, en 1948 pendant les deux années qu’il passa au sanatorium de Nordrach en Allemagne. Marqué par l’hindouisme, il vécu durant ces longs mois une évolution intérieure qui va le mener au christianisme.

Jean collabora de 1952 à 1981 à la revue Esprit. Très marqué par les figures chrétiennes de Charles Péguy, Emmanuel Mounier, Henri de Lubac, Hans Urs von Balthasar et de Pierre Teilhard de Chardin.

Il put progressivement faire des connexions avec sa foi chrétienne et chercher dans la Tradition, notamment des Pères de l’Eglise, les éléments qui permettent d’affermir les raisons chrétiennes de l’engagement à la sauvegarde de la création. Même si la plupart de ses livres sur l’écologie chrétienne ont été écrit après le décès de son épouse, il la considérait comme son inspiratrice et associa toujours le nom d’Hélène à sa signature.En dehors de son activité professionnelle de professeur par correspondance, le travail auprès de l’association « Amitié Charles Péguy » fut certainement ce qui l’occupa le plus au long de sa vie, avant qu’il ne consacre toutes ses énergies à faire sensibiliser le public à ce qu’il appela un temps « l’écologie chrétienne » . Fin 2011, il confie à Pauline Bruley, qui lui succède à la gérance du Bulletin de l’Amitié Charles Péguy :

 

 Péguy m’a accompagné toute la vie et permis de devenir le chrétien catholique socialiste libertaire que je suis toujours

 

Jean écrivit de nombreux ouvrages : essais, poèmes, anthologies et  pièces de théâtre . Mais à partir des années 1990, sa production littéraire s’orienta vers les questions d’écologie. Il développa une sensibilité concrète à la création au cœur de la foi chrétienne.

 

Fécondité intellectuelle et spirituelle du couple

Pour Hélène et Jean,

les chrétiens ont une « mission cosmique

 

Toujours pour des raisons de santé, Le couple Bastaire n’eût pas d’enfant.

C’est bien sous l’influence de sa femme, qui fut une militante de la première heure de la cause animale et de l’écologie, que dans les années 1960, Jean Bastaire entame une longue réflexion sur les fondements théologiques d’une « écologie chrétienne », en s’appuyant sur la lecture des Pères de l’Église.  Les premiers ouvrages écologistes paraissent après le décès de son épouse ; ils sont néanmoins signés Jean et Hélène Bastaire car il estimait qu’elle était autant que lui auteur de ce qu’il écrivait. Jean considérait Hélène comme son inspiratrice et entretint une grande relation spirituelle avec elle, y comprit après sa disparition. Ses essais écologiques sont autant de réflexions pour affirmer le lien de charité qui unit la création et les créatures. L’éternel amoureux d’Hélène tint à être enterré à Châteauneuf en Thimerey en Eure et Loire, lieu de la sépulture de son épouse bien aimée.

 

« Une exigence écologique chrétienne »

C’est dans les rangs des jésuites que Jean Bastaire a particulièrement puisé pour sa réflexion théologique. Il a entretenu une certaine proximité critique avec l’œuvre de Teilhard de Chardin et a correspondu avec Henri de Lubac. Il se considérait comme un disciple de Hans Urs von Balthasar en ce qui concerne le salut de toute la création. Mais c’est au P.François Euvé sj, directeur de la revue Etudes et professeur de théologie au Centre Sèvres de Paris, qu’il soumit bon nombre de ses livres pour une relecture théologique avant publication.  Il se réjouissait que les papes successifs se mirent à promouvoir un engagement de l’Église dans le domaine de l’écologie, mais aussi quelques évêques et avec lesquels il entretenait une correspondance soutenue. Dans le sillage du « Cantique des créatures » de saint François d’Assise Jean rêvait de la constitution de « petits frères et petites sœurs de la création ». Il aurait aimé que les franciscains soient ces frères de la création, mais celui qui sème n’est pas toujours celui qui récolte. Il aurait été heureux de voir que dans le sillage de l’encyclique Laudato Si du pape François, mais aussi d’après sa propre inspiration, des groupes de chrétiens ont commencé à se rassembler sous cette dénomination de « petits frères et petites sœurs de la création ». Jean estimait que le christianisme pouvait apporter à la sensibilité et aux courants écologistes une réflexion sur le sens de leur démarche. L’écologie n’est pas seulement affaire scientifique, éthique – comment faire pour bien faire ? – ou politique ; elle est affaire spirituelle, métaphysique, car c’est le sens même de la condition humaine dans le monde qui est concerné. Il écrivait en 2005 :

 

La tâche des chrétiens est aujourd’hui de rechristianiser la matière, de rebaptiser la création, de resanctifier l’univers .Ils doivent « redécouvrir leur propre doctrine » (ECC)

 

Malgré son caractère passionné, il ne répugna pas à la discrétion. Il était étonné que les chrétiens aient oublié la dimension cosmique du salut, pourtant si présente dans la Bible et la pensée chrétienne des premiers siècles. Il était heureux d’avoir découvert de jeunes théologiens sensibles à cette dimension.  Infatigable militant il était présent dans une multitude de rassemblements chrétiens ou non, pour porter la bonne nouvelle de la création et ce malgré une santé fragile. Il vivait en fait une grande « impatience à voir arriver l’heure de Pâques » (TI). Il attendait  le retour du Christ dans la gloire. Cette attente était renforcée par le sentiment que le monde chrétien, ne semble plus attendre  cet accomplissement de la création.

 

 

Rien n’est plus urgent que

d’affirmer cette Pâque de l’univers entier

 

• Jean Bastaire à publié une biographie de son épouse (La Gloire de Sophie, 2000) et le récit de son deuil (La Pâque à deux, 2004).
• Les archives personnelles et familiales d’Hélène Périchon-Bastaire sont conservées avec celles de Jean Bastaire à la Bibliothèque Lafayette (BCU- Lettres et sciences humaines).
• Un « Fond Jean Bastaire » a été créé à l’université de Clermont-Ferrand pour étudier son héritage littéraire.

https://bastaire.hypotheses.org/jean-bastaire

https://bastaire.hypotheses.org/helene-bastaire

• Une chaire « Jean Bastaire d’écologie intégrale » a existé de janvier 2015 à août 2023 à l’Université Catholique de Lyon pour prolonger son travail en contexte universitaire.
• Un Centre « Hélène et Jean Bastaire » est créé en septembre 2023 dans le Lot, à Berganty près de Cahors pour prendre le relais de la chaire et aussi valoriser les œuvres de Jean dans le domaine écologique.